Bourse d’excellence 2019

Arielle Frenette
Candidate au doctorat en géographie

Glocalisation : la prise de parole des femmes inuit dans l'activisme environnemental global.

Résumé du projet:

Portés surtout par des groupes d’activistes multinationaux, les mouvements écologiques et de protection des droits des animaux s’insèrent aujourd’hui dans la culture populaire par une forte présence médiatique et l’appui de célébrités, de même que par des campagnes publicitaires soutenues d’images-choc. L’utilisation de ces icônes peut résulter en des actions parfois déphasées d’avec la réalité culturelle locale, entraînant toute une série d’impacts sur les populations : par exemple, les campagnes anti-chasse aux phoques ont eu des répercussions économiques et culturelles importantes auprès des communautés inuit. L’Arctique, vulnérable aux changements climatiques et dont les territoires, espèces et populations sont largement représentés dans les campagnes environnementales, s’impose comme un terrain de recherche particulièrement riche pour étudier ces dynamiques. Le caractère fortement masculin et « traditionnel » des images nordiques véhiculées pose également la question de l’impact de ces campagnes sur les définitions locales contemporaines du genre et du rôle social des femmes, invisibilisées du discours occidental. Paradoxalement, toutefois, certaines femmes inuit telles que Mary Simon ou Sheila Watt-Cloutier (pour ne citer que celles-ci) ont activement participé au débat environnemental en prenant parole sur la scène internationale. De même, la production et la diffusion du film Angry Inuk (2016) donne une nouvelle voix critique féminine au débat afin d’exposer les impacts socio-culturels et économiques des campagnes internationales contre la chasse au phoque. À travers une approche multiscalaire centrée sur le concept de glocalisation, ce projet poursuit l’objectif plus large de poser un regard critique sur les discours environnementaux et les représentations du Nord dans un contexte de mondialisation. Le principe de glocalisation consiste en un saut d’échelle du « local » directement vers le « global » ; cette approche s’applique bien dans le contexte arctique, où, malgré un éloignement géographique, la culture inuit est néanmoins diffusée sur la scène internationale. Aujourd’hui, la glocalisation se redéfinit par l’usage des réseaux sociaux comme un vecteur de prise de parole individuelle sur la scène internationale. Au Nunavut et au Nunavik, cette nouvelle forme d’affirmation glocale semble largement portée par des jeunes femmes qui s’approprient et partagent leur vision du territoire, laissant entrevoir une modernisation de la relation – symbolique et pratique – entre les Inuit et leurs espaces de vie. Dans un contexte de décolonisation, la représentation locale et actualisée du territoire nordique devrait être mieux connue et prise en compte, notamment en ce qui a trait à la pratique des activités traditionnelles dans les actions visant la protection de l’environnement.